Autoportrait de Martin Parr

« Les photographes de Magnum partent en croisade photographier la famine et la faim […], en ce qui me concerne je vais au supermarché du coin, c’est ma ligne de front », déclare Martin Parr.  Depuis 1994, il travaille pour la coopérative photographique Magnum. Magnum est une agence dont le principe est que la propriété intellectuelle reste au photographe, ce qui montre une certaine autonomie.

Il commence la photographie à 13 ans. Encouragé par son grand-père et va très tôt porter un regard critique sur le monde qui l’entoure.

La photographie Untitled (Bus Shelter)

Untitled (bus shelter) est une image prise à New Brighton en Angleterre. Elle est en trois parties avec des couleurs marquées et une perspective peu prononcée. La question de la planéité est importante dans cette œuvre.La scène semble porteuse d’un message sociale et d’une critique de la société qui n’est pas pour autant de la simple moquerie. 

Martin Parr utilise un argentique, plus précisément un Plaubel Makina de moyen format, équipé d’un objectif grand angle (55 mm) et d’un flash auquel il a recours même par temps lumineux. Aucun montage n’est effectué, ni aucune mise en scène sur cette photographie qui semble pourtant construite méthodiquement. La distanciation du photographe se fait ressentir. Comme si les personnages présents ne le voyaient pas, ne le prenaient pas en compte. Untitled est une oeuvre extraite d’un corpus nommé The last Resort. Un livre publié en 1985 qui contient une série  réalisée entre 1982 et 1985. La photographie étudiée ici est datée d’entre 1983 et 1985. Il s’agit donc de la dernière décennies dans années Thatcher, réduisant les dépenses publiques et augmentant la précarité salariale le public photographié par Martin Parr, le plus souvent des habitants de petites villes peu riches est fortement touché. 

Dans quelle mesure, la photographie de Martin Parr, Untitled (Bus Shelter), est-elle une œuvre construite portant un regard sur certaines pratiques tout en restant de l’art  ?

La construction de l’image mène à une satyre du peuple non dissimulée qui nous amène à nous demander si cette photographie est une photo de reportage, documentaire ou une photographie d’art.

La construction de l’image 

En effectuant une lecture de gauche à droite l’image est séparée en trois parties distinctes avec plusieurs personnages qui représentés toutes les périodes de la vie

 Malgré les différentes parties l’impression planéité est présente. Elle est donnée par la focale de 55mm de son appareil. Celle-ci à la particularité que  les distances et perspectives soient écrasées pour diminuer l’impression de profondeur. 

La couleur à un rôle majeur dans la découpe de l’image, elle se superpose presque aux différents plans de l’image. 

Concernant la place pour le photographe dans la composition, aucun regard ne croise celui du photographe, il ne semble pas exister.

Une satyre du peuple non dissimulée

Bus Shelter montre une satyre du peuple non dissimulée. L’image de ces personnes qui ne communiquent pas entre eux ni avec le photographe est forte.

Notons que le lieu est non-propice à la photographie. Cet arrêt de bus pourrait être à n’importe quel endroit. Les déchets sont mis en avant dans le premier plan. Cela rend le lieu encore moins adapté à la photographie. Ce sont des détails qui seraient retirés pour faire ce que l’on appelle une “belle photo” dans un “beau décors”. 

S’agit-il d’une photographie documentaire ou photographie d’art ? 

La photo de Martin Parr par son côté critique et psychologique peut amener à penser qu’il s’agit d’une photographie documentaire. Cependant la construction de l’image et le travail sur les détails en font aussi une photographie d’art. Pour moi c’est un entre deux parfait : une photo artistique issu d’une série mais qui revendique un aspect social.

Pour résumer tout cela il faut rappeler Martin Parr se dit photographe documentaire mais avec une importante vision esthétique et artistiques. Celle-ci est à prendre en compte dans sa satire du peuple qu’il décide de ne pas dissimuler. Tout au contraire  il va le mettre en lumière derrière son flash et via une construction de l’image travaillée. 

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